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        Quelle valeur accorder à la morale ?

 

 Introduction

 

 La vie des Hommes en société est dirigée par des règles qui orientent leurs actions et guident leurs choix :  on peut distinguer différentes règles :

 

      -          Les règles juridiques (fixées par l’Etat)

      -          Les règles religieuses (fixées par les religions)

      -          Les règles morales (fixées par la société et/ou par la  conscience                  des individus)

  

Dans ce cours nous allons nous intéresser plus particulièrement aux règles morales (même s’il existe bien sûr des interactions importantes avec les autres règles).

 

Définition :   La morale est l’ensemble des règles qui font la différence entre le bien et le mal.

On peut préciser les points suivants :

- Une règle définit ce que l’on doit faire, c’est une norme.  Il est possible de ne pas la respecter (avec dans ce cas un risque de sanction).

 

  - Une règle devient un devoir lorsqu’elle crée chez une personne un sentiment d’obligation qui peut s’opposer à la réalisation d'un désir ou exige de sacrifier son intérêt personnel. 

 

 Questionnements :

 

1/ Quelle est l’origine de l’obligation morale ? Les règles morales ont-elles uniquement une origine sociale ou bien d’autres sources peuvent -elles être trouvées ?

 

2/ Quelles sont les conséquences de l’obligation morale ?  Plus particulièrement, quels sont les liens entre les règles morales et la liberté d’un côté et le bonheur de l’autre ?

  

 

 

                                I/ Quelle est l’origine de la morale ? 

 

 La conscience morale de l’individu a-t-elle pour origine les règles sociales qui ont été intériorisées ou bien existe-t-il d’autres sources ? 

 

 1 / La morale est acquise :

 

 On peut penser que la conscience morale d’un individu est acquise par l’intériorisation des normes et valeurs de la société. Cette idée est mise en avant par les études conduites en sciences humaines comme la sociologie. 

 

A/ L’éducation des parents :

 

Freud soutient que l'éducation des parents apportent à l'enfant les principes de la morale.  L’enfant intériorise très jeune les interdits parentaux qui développent la conscience morale de l’individu.

 

Dans les termes de la psychanalyse, ces interdits forment le  surmoi  qui joue un rôle important : il constitue une barrière qui se dresse contre certains désirs et forme une image idéale du moi.

 

 B/ Les règles de la société :

 

Selon Durkheim, l’un des fondateurs de la sociologie, l’éducation parentale n’est que le relais des règles sociales.  Ici c’est la société tout entière que constitue la source des règles morales qui sont intériorisées par l’individu.

 

 Durkheim écrit en évoquant la « voix de la conscience »: « quand notre conscience parle, c’est la société qui parle en nous ».

 

 Les règles intériorisées paraissent à l’individu d’autant plus légitimes qu’elles seront plus largement suivies par les autres membres du groupe social (le rôle des exemples est très important).  Elles pourront même paraître « naturelles » au fil du temps faisant presque disparaître leurs origines sociales.

 

Lorsqu’elles sont intériorisées, les règles ne semblent plus constituer de limite à la liberté, du moins d’un point de vue subjectif.  

 

C/ Ces règles ont-elles une valeur relative ou absolue ?

 

Si la morale est par essence sociale , on  en déduit que les valeurs qu’elle transmet sont relatives aux sociétés et à leurs époques confirmant l’adage courant : « autre temps, autres mœurs ».   Ce que nous jugeons « mal » pourrait-il alors être considéré comme « bien » dans un autre groupe social ou à une autre époque ?       Existe-t-il des normes morales universelles ? Comment peut-on les établir ?

 

Pour échapper au relativisme, il faudrait être en mesure de trouver une autre source à morale.  Cela reviendrait aussi à distinguer les mœurs (manière de vivre propre à un groupe social) de la morale à proprement parler qui aurait alors une portée beaucoup plus générale voire universelle.

 

 2/Une origine naturelle : la thèse de Rousseau    

 

On peut émettre l’hypothèse que l’Homme peut trouver en lui-même les règles morales indépendamment des règles de la société. C’est d’ailleurs pour cette raison que l’individu peut parfois se « révolter » contre des normes sociales qu’il juge alors injuste.

 

On peut prendre pour référence à la thèse de Rousseau. Celui-ci qui soutient que les principes de la morale sont innés. Il fait d’abord référence à une conviction religieuse.

  

a/ La conscience, instinct divin

 Dans son œuvre l’Emile ; il écrit au sujet de la conscience morale :  « conscience, conscience, instinct divin, guide infaillible d’un être ignorant et borné ».

 

Cette formule insiste sur le fait que tout Homme malgré toutes ses imperfections (soulignées par les termes : « ignorant », « borné ») peut trouver en lui-même des principes moraux s’il sait écouter la « voix de sa conscience » sans se laisser influencer par les préjugés de la société

 

b / Le sentiment naturel : la compassion  

 

Cette idée apparaît sous un autre angle dans le  Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les Hommes.

  Rousseau   soutient qu’il existe dans le cœur de l’Homme un sentiment naturel qu’il nomme la pitié et dont le sens se rapproche de ce que l’on nomme de nos jours compassion (du latin : cum patior, « je souffre avec »).

 

 La morale se rapporte cette fois à une forme de sensibilité qui fait « se sentir mal » quand on voit une autre personne souffrir. Il s’agit ici d’un phénomène d’identification aux autres.  L’Homme qui ressent ce sentiment s’abstiendrait de faire du mal et pourrait même venir en aide à celui qui souffre.

 

Il  est donc certain que la pitié est un sentiment naturel, qui, modérant dans chaque individu  l'activité de l'amour de soi-même concourt à la conservation mutuelle de toute l'espèce. C'est elle qui nous porte sans réflexion au secours de ceux que nous voyons souffrir: c'est elle qui, dans l'état de nature, tient lieu de lois, de mœurs et de    vertu, avec cet avantage que nul n'est tenté de désobéir à sa douce voix: c'est elle qui détournera tout sauvage  robuste d'enlever à un faible enfant, ou à un vieillard infirme, sa subsistance acquise avec peine, si lui-même espère  pouvoir trouver la sienne ailleurs (…) Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les Hommes

 

Ce sentiment naturel constitue pour Rousseau l’origine des règles morales toutefois plusieurs objections peuvent être mentionnées contre sa thèse :comment expliquer en effet qu’il existe autant de cruauté dans les actions de l’Homme s’il existe vraiment un sentiment de compassion traduisant la « bonté naturelle » ?

 

  La réponse de Rousseau tient à son analyse de la société qui « corrompt » la nature originelle de l’Homme :  le développement de la société accentue les différences et elle rend plus difficile l’identification avec les personnes appartenant à un groupe social différent.

Toutefois la thèse de Rousseau présuppose que la nature originaire de l’Homme est « bonne » mais comment le prouver ?  Est-il alors possible de trouver une norme morale universelle sans admettre ce présupposé ?

                

3 / La morale fondée sur la raison : thèse de Kant

 a : la raison fixe une règle morale :

 Kant soutient que la raison est capable de fixer par elle-même une règle morale « la raison pure est pratique ». En effet, l’Homme est capable de réfléchir par lui-même, il peut trouver dans sa propre raison la norme de son action. 

 

Kant utilise l’expression impératif catégorique pour désigner la règle morale fixée par la raison.

b : l’impératif catégorique et les impératifs hypothétiques

 

-L’idée d’impératif est liée à l’idée d’un ordre, d’une injonction, d’un commandement. La raison ordonne à l’Homme d’accomplir un acte. Elle énonce une loi.

- Le terme catégorique permet à Kant de hiérarchiser les directives de la raison en deux registres :

Les impératifs hypothétiques :  ces sont des impératifs de l’habileté, ou de la prudence. La raison en effet permet de trouver les moyens pour atteindre certains buts. Dans ce cas, la raison ne s’intéresse pas à la valeur de ces buts mais seulement aux moyens de les réaliser.

 

 Imaginons une personne qui désire s’enrichir.  Sa raison peut l’aider à trouver différents moyens pour réaliser ce but. (si tu veux t’enrichir alors paye tes dettes, si tu veux t’enrichir alors travaille, si tu veux t’enrichir alors il faut faire des économies, rechercher  des bons placements…) cependant le fait de s’enrichir n’est pas en soi un but qu’on est obligé de rechercher, cela reste « conditionnel ».

 

L'impératif catégorique désigne un ordre inconditionnel , une injonction  qui prend la forme du « tu dois » dont l’autre versant est l’interdit :  « tu ne dois pas » .   La raison fixe ici le but à réaliser et non pas les moyens.

 

Reprenons l’exemple de la personne qui souhaite s’enrichir, elle pourrait trouver des moyens comme voler, escroquer, participer à un trafic d’être humain...  La loi morale fixée par la raison se dresse contre ce type d’action. Elle érige un interdit qui n’est pas « négociable ».  La raison dresse en quelque sorte un interdit par rapport à ce type d’action .( Comme tout interdit celui-ci peut être transgressé mais la personne ne pourra pas ignorer que ce qu’elle a fait est mal car c’est sa propre raison ou conscience qui lui fait savoir).

 Mais quels sont les interdits fixés par la raison ?

Kant ne fixe pas une liste de commandement mais énonce une règle générale que tout à chacun peut découvrir dans sa raison. Cette règle consiste à universaliser son action comme on va le voir.

 

c : Les formulations de l’impératif catégorique

  La première formulation de l’impératif catégorique met en avant l’universalité de l’action :

         « Agis uniquement d'après la maxime qui fait que tu puisses vouloir en même temps qu'elle devienne une loi universelle. » 

(Une maxime désigne une règle de conduite)

 Kant propose une règle simple pour savoir si l’action est morale ou pas. On doit se demander si on pourrait vouloir que tout le monde agisse comme on souhaite le faire.   Si on ne voudrait pas que tout le monde agisse comme nous, alors l’action n’est pas morale.

 De manière plus simple, Kant reprend  l’idée commune selon laquelle : il ne faut pas faire aux autres ce qu’on ne voudrait pas qu’ils nous fassent toutefois cette formulation reste trop subjective et manque de rigueur, c’est pourquoi Kant la reformule dans des termes plus précis.

 

Kant insiste sur la contradiction logique qui apparaît lorsque l’action n’est pas morale : Certaines actions se « contredisent » si on les universalise.

 Kant, prend l’exemple d’une personne qui emprunterait de l’argent tout en sachant qu’il ne pourra pas rembourser.  Il suffit alors de se demander ce qui se passerait si tout le monde faisait cela. Bien évidemment plus personne ne prêterait d’argent. En universalisant l’action, on découvre qu’elle se « contredit ».

 De même, on souhaite parfois mentir pour échapper d’un embarras mais que se passerait-il si tout le monde mentait tout le temps ?  Le mensonge lui-même ne serait plus possible.

Kant précise le sens l’impératif catégorique avec une seconde formule qui met davantage en avant cette idée de respect des personnes.

 Agis de façon telle que tu traites l'humanité, aussi bien dans ta personne que dans toute autre, toujours en même temps comme fin, et jamais simplement comme moyen.

 

La seconde formule de l’impératif catégorique met en avant le respect de la personne humaine : il s’agit de traiter autrui comme une fin en soi et non comme un moyen. IL n’est pas moral de traiter les autres personnes et même sa propre personne comme un simple moyen ; l’esclavage est l’exemple extrême dans lequel l’autre devient qu’un simple moyen.

 

Enfin,  la troisième formulation de l’impératif catégorique met en avant l’autonomie. La loi morale est une règle de conduite que l’on doit trouver dans sa propre raison : il ne s’agit pas d’obéir un la loi de l’Etat ou à une autorité extérieure. En obéissant à la loi morale, l’Homme ne fait qu’obéir à lui-même. Il est autonome (auto= soi-même ; nomos = loi) et préserve ainsi une forme de liberté.

 

d : Action conforme au devoir et action faites par devoir

 

Il faut souligner que pour Kant la moralité de l’action dépend de la « cause » pour laquelle elle est réalisée ce qui le conduit à distinguer les actions conformes au devoir et les actions faites par devoir.

 

Kant prend un exemple pour faire comprendre cette distinction : un vendeur honnête rend correctement la monnaie à un enfant qu’il pourrait facilement duper. Son action est-elle morale ?

 Tout dépend pour Kant de la raison pour laquelle cette action a été réalisée. Extérieurement, c’est une action conforme à la morale mais si le commerçant a été honnête pour s’attirer une bonne réputation et favoriser son commerce alors son action n’est pas véritablement morale. Elle n’est pas faite par devoir.  En revanche, si la personne est honnête sans autre raison que le respect de la loi morale alors son action a dans ce cas un caractère véritablement moral. Son action est  faite par devoir.  Il n’est donc pas évident de savoir si les actions des hommes sont vraiment morales car les « intentions » restent cachées.

 

 On a vu que Kant cherche à établir une morale parfaitement rationnelle qui énonce un principe universel fondé sur le respect de la personne humaine mais cette règle est-elle vraiment applicable dans toutes les situations ? Son aspect « formel » ne la rend elle pas aveugle à certaines situations particulières ?   Agir moralement a-t-il toujours de bonnes conséquences ?   

 

 

      II / Les théories  morales :   Morales déontologiques , conséquentialistes et utilitaristes

 

              Benjamin Constant est l’un des premiers auteurs à souligner les risques de la morale Kantienne en prenant l’exemple du mensonge. Si l’on suit la morale Kantienne, il est immoral de mentir (car on ne peut pas universaliser le mensonge) pourtant dans certaines situation cette position semble intenable selon Constant. Il prend l’exemple d’assassins qui poursuivraient un de nos amis qui aurait trouvé refuge dans notre maison. Faudrait-il trahir notre ami en disant la vérité s’ils nous demandaient où il se cache ?  Une bonne intention pourrait-elle avoir de fâcheuses conséquences ?

 

 Pour agir moralement, il faudrait donc prendre en compte les conséquences des actes plutôt que les « grands principes » or c’est l’expérience et non la « raison pure » qui peut nous aider dans ce cas.

 

Deux types de conceptions morales s’esquissent alors : les morales qui énoncent des règles, des principes. On peut les nommer les morales déontologiques et les morales qui prennent surtout en compte les conséquences. On peut les nommer les morales conséquentialistes.

  

 1/ La morale déontologique  - Kant

 

            La morale de Kant est l’illustration d’une morale déontologique car elle fixe des principes qu’il faut suivre da façon inconditionnelle pour que l’action soit considérée comme morale. Ainsi Kant considère par exemple qu’il ne faut pas mentir si l’on veut agir moralement quelle que soit la situation.  Ce qui compte, c’est la pureté de l’intention et non les conséquences qui peuvent survenir.

  

 D’ailleurs Kant dans sa polémique avec Benjamin  Constant lui répond que l’on ne peut jamais prévoir toutes les conséquences des actions. Il « s’amuse » à présenter des variantes à la situation imaginée par Constant. Le mensonge que devait sauver l’ami pourrait très bien précipiter sa perte.  Dans ce cas, nous aurions en plus de la perte d’un être chère un poids supplémentaire sur la conscience car c’est notre mensonge qui l’aurait condamné.  Pour Kant il faut s’en tenir uniquement aux principes car l’Homme n’est pas omniscient, il ne peut jamais connaître toutes les situations ni toutes les conséquences à plus ou moins long terme de ses actions.  Il se rapproche ainsi d’une certaine manière des positions morales fondées sur la religion (qui énonce des principes qu’il faut appliquer de façon inconditionnelle comme le célèbre : « Tu ne tueras pas » qui fait partie des dix commandement.)

 

                      [Un film intéressant qui illustre cette position  « Tu ne tueras point » de Mel Gibson]

       

2/Les morales conséquentialistes – Constant

 

Les morales qualifiées de « conséquentialistes » examinent les répercussions des actions pour décider si elles sont bonnes ou mauvaises.  Mais qu’est- ce qu’une bonne ou mauvaise conséquence ? Intuitivement dans l’exemple de Constant : la bonne conséquence, c’est de sauver notre ami et la mauvaise serait de le faire tuer.   Les morales conséquentialistes doivent donc établir au préalable ce qui est « bien ».  Elles peuvent soit l’établir en se fondant sur l’opinion commune (comme c’est le cas chez Constant) , soit chercher à établir le « bien » sur une base plus rationnelle.

 

3) L’utilitarisme-  Bentham

 

L’utilitarisme est l’une des conceptions morales conséquentialistes les plus élaborées. Elle est développée par Jérémy Bentham et par John Stuart Mill.

  

a : Qu’est ce que  « le bien » et  « le mal » pour l’utilitarisme ?

  

Le point de départ de Bentham est l’observation des actions humaines. Bentham constate qu’il existe un écart important entre les paroles et les actes. En parole les Hommes disent qu’il ne faut pas mentir, qu’il faut être honnête, juste  mais en pratique, ils agissent différemment n’hésitant  pas à transgresser ces principes quand leurs désirs ou intérêts prédominent .  Ce que recherchent vraiment les Hommes, c’est principalement à obtenir tout ce qui contribue à leur apporter du plaisir  au sens large (physique, moral, esthétique…) ou encore à parvenir au « bonheur ».

 

On peut donc en déduire que le bien pour l’Homme ce sont toutes les choses qui sont utiles pour se procurer du plaisir et atteindre le bonheur – (des biens matériels, des liens sociaux, des ressources intellectuelles). En revanche le « mal » désigne tout ce qui prive l’Homme de ce qui lui est utile et qui le fait souffrir.

 

 

b : Qu’est ce que l’action morale pour l’utilitarisme ?

 

 

A présent que les idées de « bien » et de « mal » sont précisées, l’action morale pourra être définie comme celle qui apporte le plus grand bonheur au plus grand nombre. En d’autres termes, l’action morale   maximise l’utilité (c’est-à-dire celle qui donne le plus d’avantage au plus grand nombre). 

 

 

Prenons un exemple (actuel) : une personne dérobe un ordinateur dans une salle de classe. Ce vol apporte un avantage pour une seule personne (le voleur qui pourra l’utiliser ou le revendre) mais ce vol pénalise tous les élèves de la classe qui ne peuvent plus l’utiliser.  Cette action est jugée comme « mauvaise » puisque le profit d’un seul s’est fait au détriment de plusieurs autres personnes.

 

 

 

A l’inverse une « bonne action » sera celle qui procure des avantages aux plus grands nombres de personnes.

 

 

 

[Notons au passage que Bentham ne dit pas que voler est mal en soi mais que dans ce cas l’action est mauvaise car elle fait « un heureux » pour plusieurs « malheureux ».  Durkheim suppose aussi que les hommes sont égaux et donc que le bonheur d’un homme est équivalent à celui d’une autre personne.]

 

 

 

C : Le dilemme du tramway :

 

 

 

  Pour mieux comprendre la position de l’utilitarisme ; on peut prendre un exemple célèbre :  le dilemme du tramway.  Imaginons qu’un tramway soit hors de contrôle et arrive à l’embranchement d’un aiguillage. Sur l’une des voies, il n’ y a qu’un seul ouvrier qui travaille, sur l’autre voie un groupe de personnes. Il n’y a aucun moyen d’arrêter le train ni aucun moyen d’avertir les ouvriers. Cependant il est possible d’actionner un aiguillage pour diriger le train sur l’une des deux voies.

 

 

 

 Selon la logique de l’utilitarisme, il faudrait actionner l’aiguillage pour limiter le nombre de victime mais cette solution oblige à sacrifier une personne car l’utilité du plus grand nombre compte plus que l’utilité du plus petit nombre.

 

 

 

Le dilemme du tramway :

 

 

 

On voit très nettement avec cet exemple la différence entre la morale déontologique de Kant et la morale utilitariste.

 

 

 

Si l’on suit la morale de Kant, on ne devrait pas sacrifier une personne  car « on ne doit pas tuer » et en actionnant le levier on est responsable de la mort d’une personne. Pour un utilitariste au contraire, on doit actionner le levier car il faut mieux sauver plusieurs personnes même si on doit en « sacrifier » une.

 

 

 

Ce dilemme semble « très abstait » pourtant certaines situations réelles rejoignent malheureusement ces hypothèses théoriques.    Les ingénieurs par exemple doivent programmer des voitures autonomes qui devront « prendre une décision » en cas d’accident et de chocs inévitables. Faut il privilégier la vie de conducteur de la voiture ou d’un groupe de piétons se trouvant sur la route ?

 

 

 

 

 

 

 

d/ Limite de l’utilitarisme

 

 

 

On comprend que l’utilitarisme soulève de nombreuses questions et  suscite d’importants débats car en refusant de définir des   « valeurs absolues », il pourrait même ouvrir la voie à des idées (et/ou pratiques) qui semblent « indéfendables ».

 

 

 

 Imaginons à présent  qu’une famille immigrée vienne s’installer dans un immeuble dans lequel toutes les familles déjà installées soient racistes.  Cela contribuerait à la satisfaction de toutes ces familles racistes de voir la famille immigrée partir.  Or   en suivant la logique de l’utilitarisme, la satisfaction d’un grand nombre de personne doit passer avant la satisfaction de quelques-unes.  Ce serait donc « bien » d’expulser cette famille immigrée pour faire le bonheur de toutes les autres.

 

 

 

Cependant qui pourrait considérer cela comme moralement acceptable ?

 

 

 

 

 

 

 

On constate qu’il n’ y pas de théorie morale parfaite. Elles suscitent beaucoup de questions.  La valeur même de la morale reste débattue.

 

 

 

 

 

 

 

II / La valeur de la morale

 

 

 

 Le rôle et la valeur de la morale restent sujet à débats quand on considère ses conséquences sur la société et l’individu.

 

 

 

 1 La valorisation de la morale :

 

 

 

  A/  Utile pour la société

 

 

 

La morale a une fonction sociale de premier plan comme l’indique Bergson dans les deux sources de la morale et de la religion. Elle facilite la cohésion ; les échanges et la bonne entente entre les individus ; les bonnes actions crée une réciprocité qui induit un cercle vertueux.  Ne pas tuer, ne pas voler, tenir ses promesses seraient les conditions d’une vie sociale harmonieuse

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

B/ Bénéfique pour l’individu 

 

 

 

On peut souligner aussi l’intérêt de la morale sur l’individu qui pourrait grâce aux règles morales contrôler ses désirs et maitre de ses décisions.  C’est d’ailleurs dans cette perspective du perfectionnisme moral que Socrate affirme qu’être injuste envers les autres, c’est en vérité nuire à soi-même. 

 

 

 

Toutefois cette approche de la morale peut être remise en question quand on prend en compte d’autres aspects de la morale.

 

 

 

 2 Les critiques de la morale

 

 

 

 A/ Morale et violence

 

 

 

Nietzsche critique la morale judéo-chrétienne c’est celle qui est encore largement présente aujourd’hui en occident).Il soutient que cette morale crée de la souffrance.  Une forme de violence   peut s’associer à cette morale car une volonté de faire souffrir, de culpabiliser serait présente dans la  volonté rendre l’homme « bon ».

 

 

 

La morale crée une « mauvaise conscience » et l’idée de culpabilité devient dominante ; les plaisirs sont considérés comme des pêchés.

 

 

 

La violence peut aussi se déchainer contre ceux qui n’ont pas une attitude conforme aux attentes du groupe. Cette violence se donne alors le visage de la bonne conscience qui lutte contre des gens immoraux.

 

 

 

 

 

 

 

B/ Morale et domination

 

 

 

 Marx dénonce une morale imposée par les dominants pour mieux aliéner les opprimés. Ainsi la forte valorisation du travail présente dans la morale judéo-chrétienne avantage les dominants qui exploite les travailleurs. Cette critique de la morale se redouble d’une critique de la religion sur laquelle elle repose.  

 

 

 

Conclusion :

 

 

 

 La valeur que l’on accorde à la morale dépend finalement de son propre système de valeur, la question initiale forme donc un cercle.  Pour évaluer la morale, il faut déjà posséder une norme morale.  Or c’est souvent à partir des normes acquises par l’éducation qu’on portera un jugement.

 

 

 

Cette observation a conduit de nombreux auteurs a chercher à établir des bases de l’action morale sur d’autres fondements que ceux acquis par la société.   Nous avons ainsi étudié la théorie des sentiments naturels (Rousseau), la morale déontologique de Kant et la morales conséquentialiste et utilitaristes de Bentham.  

 

 

 

Ces différents systèmes de pensée comportent toutefois certaines limites ce qui montre que finalement la morale reste une affaire personnelle : chacun doit alors être en mesure de se constituer une éthique personnelle.