Introduction

 

           Socrate, le procès du philosophe

 

 Dans son œuvre  L’apologie[1] de Socrate , Platon restitue le discours prononcé par Socrate lors de son procès.      Agé de 70 ans, Socrate doit comparaitre pour la première fois devant un tribunal en l'an -399 à Athènes.  Ses accusateurs, Mélétos, Anytos et Lycon lui ont intenté[2] un procès en déposant une plainte au tribunal en prétextant qu’il corrompt[3]  la jeunesse et n’honore  pas les dieux de la Cité. Dans son apologie , Socrate réfute point par point les accusations et montre leurs contradictions. Pourtant le discours rationnel qui cherche à convaincre[4] peut-il l'emporter contre celui des orateurs qui utilisent la rhétorique pour persuader[5] leur auditoire ?

  

Le procès, qui dure une journée, ne sera pas favorable à Socrate puisqu'il est condamné à boire la cigüe, un poison mortel.  Mais Socrate  cherche- -il vraiment à se défendre ? Ne  cherche t-il pas plutôt à produire encore une fois un sursaut dans  la conscience des Athéniens ?  A aucun moment, il ne tente  semble t-il, à attirer sur lui la compassion[6], il  n'hésite pas à  utiliser  l’ironie[7] et se montre provocant lorsqu'au moment où il doit lui-même fixer sa peine, (conformément aux procédures judiciaires de l'époque) , il réclame une récompense, celle d'être nourri au prytanée (c'est-à-dire être nourri gratuitement aux frais de la cité jusqu’à sa mort), récompense attribuée habituellement aux héros de la Cité.

 

 Quoiqu'il en soit, ce procès s’inscrit dans une période de grande instabilité politique et dans un contexte de « chasse aux sorcières ». En effet, suite à la défaite d’Athènes contre Sparte, les athéniens recherchent des boucs émissaires[8]. Pour que l’honneur soit sauf, il est nécessaire d'imputer[9] la défaite à des traitres, à des "ennemis de l’intérieur". Socrate va faire les frais de cette vindicte[10]: le peuple qu'il côtoie depuis toujours se range du côté des accusateurs et le considère comme celui qui a affaibli les valeurs de la Cité  et  qui a entrainé sa défaite.

 

 Ainsi au -delà de l'aspect autobiographique[11] du texte, des questions plus générales apparaissent concernant le langage, la politique, la morale.  Le procès de Socrate apparaît également comme une forme de procès politique qui conduit à se questionner sur la justice et les lois.

 

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[1] Discours cherchant à défendre, à justifier et par extension à louer une personne, une doctrine, une cause.

 [2] Entreprendre une action en justice contre quelqu’un.

 [3] Corrompre : ici :  Exercer une mauvaise influence de nature à pervertir une personne, à le rendre mauvais moralement.

 [4] persuader / convaincre.

 persuader =  consiste à amener quelqu'un à penser ou à croire  en jouant sur sa sensibilité, par voie de séduction.    convaincre consiste à amener quelqu'un à admettre une façon de penser ou de se conduire en lui exposant les raisons qu'il peut avoir de l'adopter.  Persuader, c’est utiliser les sentiments, convaincre, c’est utiliser le raisonnement pour changer l’opinion,  le point de vue d’autrui.

[5] Voir note 4

[6] Compassion : ici la pitié

[7] Procédé qui consiste à se moquer en disant le contraire de ce que l’on pense.

[8] Bouc émissaire = personne qui sert de « coupable » et qui est alors injustement maltraitée ou soumise à des violences.

[9] Imputer = attribuer

[10] Vindicte : vengeance

[11] : biographie d’un auteur faire par lui-même ; le fait de raconter sa propre vie.